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L’idée même de richesse

La question de la richesse, ainsi que du bonheur, est un sujet qui m’attire : dans un monde qui pousse à être heureux en consommant, qui ne donne une valeur à l’individu que sur la base de son travail, qui place socialement l’homme par son argent, peut-on trouver d’autres valeurs de “richesse” auxquelles se raccrocher ? Tentative de réponse avec ce livre, qui rate son public…

Louis XIV et les banlieues

L’auteur, Alain Caillé, sociologue, est fondateur de la Revue du MAUSS (mouvement anti-utilitariste en sciences sociales : je ne développe pas le sujet ici…). Son cheval de bataille : développer une autre forme de richesse, non marchande, axé sur le don.

La première partie de son livre s’attache à relativiser la notion de richesse : être riche dans le sens premier du terme, tel que le PIB aime le mesurer, se définit dans un espace-temps. Ainsi Louis XIV aurait donné une fortune pour avoir l’eau courante chaude ou un dentiste ne le faisant pas souffrir : “Doit-on en conclure que n’importe quel habitant d’une banlieue à problèmes est en fait presque aussi riche, voire plus, que Louis XIV ?” Oui et non…

Cet indétrônable PIB

Concernant ce PIB justement, ce sacré PIB, il serait temps de trouver une autre mesure de la richesse : des études montrent que, passé un certain seuil de richesse national, l’accroissement de richesse n’apporte qu’un bonheur minime, voire nul. La satisfaction du monde occidental stagne depuis les années 70 ! “Autrement dit, et cela mérite d’être noté, depuis les débuts du triomphe du néolibéralisme et du capitalisme rentier et spéculatif” (page 70).

De plus, nos pays “riches” s’accrochent encore à la croissance alors qu’ils perdent leurs industries : n’est-il pas temps que les politiques suivent d’autres baromètres ? D’autres indicateurs existent, mais le bonheur et les définitions alternatives de la richesse sont difficilement quantifiables : on est plus dans la philosophie que l’économie…

Est riche celui qui jouit de nombreuses gratuités

L'idée même de la Richesse, donnée à Mobilou
J’enrichis Mobilou avec ce don

Alors l’auteur en arrive à opposer à la définition étroite de la richesse, la sienne : “est riche celui qui jouit de nombreuses gratuités, sait les recevoir et les reconnaître comme tel, et en prodiguer à son tour” (page 53).

Nous entrons dans la deuxième partie du livre, la plus difficile, car le thème est abordé de manière pointue : il est évident qu’on s’adresse aux initiés, et le lecteur “bêta” que je suis a du mal à s’y plonger avec passion !

On y trouve par exemple, la comparaison entre la richesse relative de l’entreprise qui cherche le profit, et les associations et ONG qui apportent des services gratuits. Ou le management à outrance qui enlève toute initiative aux travailleurs, d’où la balance entre le bonheur apporté par un emploi et celui de pouvoir participer à un objectif.

L’idée même d’un bon livre

On trouve peu de critiques de ce livre sur le net : c’est fou le nombre d’articles qui se contentent de formuler autrement la quatrième de couverture…

Alors je me devais d’en parler, pour mettre en garde : cet ouvrage est ennuyant ! Si la première partie se laisse lire, la deuxième se termine aux forceps. Et ainsi l’auteur manque l’occasion de nous intéresser à ses idées.

Mais le sujet n’est pas clos avec cet article : on y reviendra avec d’autres lectures autrement plus passionnantes, car la richesse, la croissance et le PIB sont de plus en plus mis en cause par ceux qui s’intéressent à notre avenir…

“L’idée même de richesse” par Alain Caillé, éditions La Découverte, 140 pages

Parmi ces définitions autour de la richesse, choisissez votre préférée...

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Le ciel ne va pas nous tomber sur la tête

15 géographes nous rassurent sur notre avenir : ça va aller ! Mais le monde qu’ils proposent ne me plaît pas !

La raison des géographes

“Le ciel ne va pas nous tomber sur la tête” : je devais absolument le lire ! A force d’être plongé dans des ouvrages alarmistes, je devais sortir la tête de l’eau, et avaler cet ouvrage comme un bon bol d’air frais.

Et j’étais vraiment curieux : comment 15 scientifiques français, pour la plupart professeurs en géographie, allaient me convaincre que, certes, le fonctionnement du monde est perfectible, mais qu’il n’y a pas de quoi s’alarmer ? Pour reprendre la quatrième de couverture : “Les géographes ont décidé de prendre la parole et de mettre les choses au clair. Leur connaissance de l’histoire mouvementée de la Terre leur permet de mieux comprendre et de mieux évaluer les changements auxquels nous allons devoir faire face.”

Ils prennent ainsi le contrepied de la presse en générale, du GIEC, des ONG, et j’en passe.

Voilà un document qui a le mérite d’exister : si comme moi vous êtes curieux des différents “sons de cloche” que l’on peut entendre sur l’état de notre monde, lisez ce livre. Mais cela ne veut pas dire y adhérer…

Le ciel ne vous tombera pas sur la tête
Un peu de lecture pour se remonter le moral !

Du réchauffement à la fine cuisine

L’ouvrage se découpe en autant de paragraphes qu’il y a d’auteurs, chacun spécialiste d’un domaine : le réchauffement, la montée des eaux, la biodiversité, l’eau, les forêts, la démographie, les énergies, … et deux sujets plutôt étonnants : la fine cuisine dans la grande distribution et le nouveau rôle des armées !

Vu le nombre de sujets traités, la plupart des chapitres vont à l’essentiel : d’abord démystifier les faits, puis rassurer et positiver. Hélas, si la première partie avance de bons arguments, la deuxième est parfois bien maigre ou les solutions avancées ne me plaisent pas beaucoup ! Voici quelques exemples…

La biodiversité se porte mieux avec l’homme

Georges Rossi, qui a consacré sa carrières aux questions de relations entre sociétés et environnements, nous dit que l’homme a toujours modifié son environnement, et que “L’état zéro de la biodiversité n’existe pas” (page 154). Vouloir préserver une biodiversité en l’état n’a donc pas de sens. D’ailleurs, une bonne partie des plantes que nous connaissons à l’heure actuelle est le fruit des manipulations humaines. Vouloir protéger la nature ne dessert pas l’homme, et de plus la biodiversité se porte mieux en sa présence qu’en son absence.

Notre professeur se focalisant sur le végétal, il en oublie toutes ces races d’animaux disparues de notre planète, non pas par l’évolution, mais par la destruction de leur habitat ou la chasse cupide. Faut-il laisser disparaître gorilles, tigres du Bengale, pandas et ours blancs parce qu’ils n’apportent rien à l’homme ? Est-ce que le Costa-Rica, protégeant 25 % de son territoire, est un mauvais exemple de protection de la biodiversité ?

Les forêts partent deux fois moins vite

Continuons dans le même thème, brièvement : Paul Arnould est spécialiste des forêts et de l’environnement et nous explique, après avoir philosophé sur la définition et le rôle d’une forêt, que “Bon nombre d’espaces défrichés retournent ensuite à la forêt” (page 174). Il n’y a donc pas, comme les médias aiment l’annoncer, un terrain de forêt disparaissant à chaque seconde, mais bien… toutes les deux secondes et demie.

Me voilà rassuré et poursuivons…

Nous n’allons pas à la famine

Alors que Gérard-François Dumont explique qu’il n’y a pas une “explosion” démographique, mais un vieillissement qui devrait nous conduire à un bon 9 milliard en 2050, et un équilibre du peuplement dû au développement des pays les plus pauvres, venons-en à Sylvie Brunel, directrice du présent ouvrage, auteure de nombreux livres sur la faim, apparaissant parfois à la télévision pour expliquer que nous pouvons nourrir tout le monde…

Et là, le discours ne souffre pas d’ambiguïté : extension des terres cultivées (un milliard d’hectares en Afrique !), augmentation des rendements, invention de nouvelles plantes, passages à des techniques plus intensives.

Après ce discours aux accents industriels, elle enchaîne avec un chapitre sur “La nécessité d’une agriculture écologiquement intensive” (page 226). Elle y fait mention, entre autres, du progrès de l’irrigation, derrière lequel on devine la privatisation de l’eau… une spécialité française, rappelons-le.

J’avoue qu’ayant vu récemment “Vers un crash alimentaire” , qui tenait un discours complètement différent, je suis dubitatif…


Sylvie Brunel parle d’un autre livre, mais ses propos résument parfaitement celui-ci

Le monde vu par les géographes : j’aime pas !

Dans la plupart des articles, tout comme dans la vidéo ci-dessus, les géographes se basent sur l’histoire de l’homme pour nous rassurer : depuis le début, il a modifié son environnement et s’est adapté, et il en est ainsi pour notre avenir.

Mais trouvez-vous que notre démographie et notre avancée technique ont suivi un accroissement linéaire ? Moi je vois plutôt une courbe exponentielle : en deux siècles la population s’est multipliée par 7, la technologie a fait un immense bon, et la demande en énergie a suivi. Mais la terre est restée à la même taille, c’est sûr. Alors des flashbacks sur Malthus (XVIIIème) qui s’inquiétait de la démographie, les conquistadors qui croyaient découvrir des forêts vierges, le Club Alpin français qui s’inquiète des montagnes en 1890, tout ça me paraît faible pour faire une projection de notre avenir !

Et est-ce que notre histoire a déjà connu la mondialisation, le libéralisme et la perte de souveraineté des pays comme nous le vivons maintenant ? Mais à lire entre les lignes, c’est bien cette situation-là qui permettrait de résoudre les maux de notre terre.

Nos géographes font confiance à l’homme, et le mettent au centre du monde : “A quoi sert de protéger la Nature si elle n’est pas mise au service du plus grand nombre ?” nous préfacent Sylvie Brunel et Jean-Robert Pitte.

Je n’aime pas ce point de vue : je me projette au delà de 2050 (ce que ne font pas nos amis les géographes) et je vois une terre caparaçonné comme Trantor, planète ville imaginée par Asimov dans son cycle de Fondation.

C’est moins joli qu’une planète bleue, mais il va falloir s’y faire…

Trantor par http://gouie.deviantart.com
Notre belle planète grise

“Le ciel ne va pas nous tomber sur la tête”, Sylvie Bruenl et Jean-Robert Pitte, 352 pages, JC Lattès

Voici deux citations opposées. Les géographes choisissent la 2ème, c'est sûr. Et vous ?

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Mobilou plongée dans la garantie

L’art de se gâcher le plaisir de consommer

Je suis de plus en plus attentif à l’origine des matériaux utilisés dans mes achats, ainsi que de leur impact écologique. Mais il suffit de trouver l’Objet tant convoité pour que toutes ces bonnes attentions passent à la trappe.

Chronique d’un grand déchirement éthique…

Vos papiers svp

S’il y a bien un clou sur lequel tape les médias, concernant notre consommation responsable, c’est celui du bois. Pour la construction, le bricolage, les meubles : exigez du bois provenant de forêts exploitées de manière responsable. Le label FSC (Forest Stewardship Council) est le plus connu.

Pour le papier, c’est bon aussi. Je lis en dernière page de “Sur la route du papier”, édition Stock : “[…] fabriquées à partir de bois issus de forêts qui adoptent un système d’aménagement durable.”

Même mon livre photos des vacances : Certifié FSC.

Avec tout ça, c’est certain : quand j’entre dans un magasin de meubles, l’article qui tentera de conquérir ma convoitise devra montrer ses papiers ! Non mais, vous savez à qui vous avez à faire ? A un consommateur RES-PON-SABLE !

Enfin, euh, la dernière fois, ce ne fut pas vraiment ça…

Equi-Table ?

Or, voilà que c’est presque par hasard que mon épouse et moi trouvons LA table de salon qui répond enfin à nos exigences de vieux consommateurs aguerris et blasés. Elle est épurée, aussi carré que notre intérieur, elle est desiiign !

Après plusieurs années de recherche, voici donc l’élue : on ne l’attendait plus, on espérait juste la trouver un jour par hasard, et ce jour est arrivé !

Alors la décision est prise en quelques minutes : on passe commande…

… Pendant que le bon de commande est rédigé, un signal rouge… euh non, vert, s’allume dans un coin de mon cerveau : ma conscience vient déranger ce moment d’euphorie. “Dis, Paul, as-tu demandé à la vendeuse l’origine des matériaux de cette table” ?

Moment d’angoisse et de tiraillement : vais-je prendre le risque de poser la question qui fâche, au risque de tout laisser en plan, pour ressortir du magasin en exprimant mes sentiments de honte ?

Je n’ose pas. Je me tais. Je fais bonne figure. Et puis je crois la vendeuse capable des pires boniments : ne s’intéresse-t-elle pas tout d’un coup à notre chien, maintenant que nous sortons la carte Visa, alors que l’instant d’avant elle le regardait comme un affreux animal salissant son beau tapis ?

Mais c’est plus fort que moi, je veux ma réponse sans casser l’ambiance : je prends le catalogue sur le bureau de la vendeuse et le feuillète, l’air de m’intéresser aux autres produits de la marque. En réalité je cherche le moindre indice pouvant apaiser ma mauvaise conscience : un petit logo FSC, une petite phrase “Pour chaque arbre utilisé nous…”, ou “Notre usine a été certifié…”. Je prends tout, je ne suis pas difficile ! Mais non, rien. Je me résine… pardon, résigne…

C’est tout ? Ben non…

Une table trop loin

J’ai oublié de le mentionner : le magasin se trouve à Lille. Oh, on a déjà vu shopping plus lointains et plus exotiques. Mais n’empêche, faire rouler un camion pour livrer notre seule table de salon me donnait un pincement au cœur !

Après un coup de fil à la société de livraison, nous nous mettons donc d’accord pour faire un “geste pour la planète” : notre meuble est bien dans le stock, mais sa livraison attendra celles d’autres clients de notre capitale…

Après presque deux mois d’attente supplémentaire et de rendez-vous manqués, cette bonne intention n’aboutit pas. Et c’est la mort dans l’âme que je vois arriver un camion pour livrer notre seule petite table…

Happy end

Mais avec la table il y a un petit livre blanc marqué “Garantie”, que mon épouse s’empresse de me mettre entre les mains : oui, elle avait bien perçu mes tourments et voilà qu’elle a les moyens d’y mettre fin !

Mobilou plongée dans la garantie
Mobilou cherche de quoi satisfaire ma conscience

Premier paragraphe : “Développement durable”, wouaw ! On y parle de fabrication minimisant les solvants, recyclage des déchets, label PEFC, et j’en passe : un vrai feu d’artifice de bonnes intentions, poursuivi sur le site de la marque, où toute une section est consacrée à leur politique environnementale.

Ah, mais il a une belle âme, ce meuble !

Et voilà, ce sera tout pour cette aventure. Je parlerai de “greenwashing” un autre jour : ne gâchons pas notre plaisir…

Pour votre prochain meuble...

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