Archives de catégorie : Agir

J’agis, vous agissez, nous agissons : du plus petit geste au grand changement, du plus futile au plus radical, ça ne sauvera le monde que si nous sommes 7 milliard à le faire…

Les Créatifs Culturels en Belgique

Voilà, j’ai refait le site des Créatifs Culturels en Belgique. Voici comment ça s’est passé…

Plus de Comic pour les CC

Rappelez-vous, il y a deux mois, je vous parlais d’un mouvement mondial qui s’ignorait : les Créatifs Culturels. Soit des gens cherchant d’autres valeurs, une autre manière de vivre. A l’époque, je m’étais interrogé sur le mouvement en Belgique : existe-t-il ? Sont-ils représentés ? Font-ils quelque chose ? La réponse fut vite trouvée, par l’existence du site www.creatifsculuturels.be. Un groupe semblait bien actif, avec même à son actif une grande enquête en 2012, portant sur l’évolution des valeurs et des comportements.

Par contre, il était manifeste que les “Créateurs d’une nouvelle culture” n’avaient pas trouvé de créateurs de site ! D’une écriture bleue foncée en Comic MS (ce set de caractères est aux designers ce que l’ail est aux vampires : il les fait fuir !) sur un fond bleu ciel, je ne pouvais laisser les choses en l’état. C’était presque une perche tendue, une porte grande ouverte pour contacter les Créatifs Culturels de Belgique – et plus si affinité…

Site web et démocratie

J’envoie un message à l’adresse officielle et la réponse vient un jour plus tard : c’est de bonne augure. C’est un certain Vincent qui me répond : il est l’initiateur du mouvement en Belgique, et par défaut le concepteur du site, qu’il a dû improviser sur trois jours en 2009.

J’apprends vite que si le site est resté en l’état, c’est parce que le groupe de travail qui devait le repenser n’est pas arrivé à mettre tout le monde d’accord…

C’est que le groupe fonctionne comme bien des mouvements de société : les décisions sont collégiales. Mais, ici je m’exprime en tant que professionnel, la démocratie n’est pas toujours bonne pour faire un site web efficace…

Tout en rondeur

Vincent accepte ma proposition de travailler sur le site : le gros du travail sera l’image et non le contenu, qui existe déjà et pourra être repris quasiment tel-quel.

Vincent et ExtraPaul sont créatifs
ExtraPaul et Vincent sont créatifs

Mais quelle image ? Voici les consignes : le site doit s’accommoder du logo en orange et turquoise, éviter les  angles pour privilégier les rondeurs (ce qui est assez éloigné des tendances actuelles), afin d’être féminin plutôt que masculin. Et ne pas verser dans les clichés New Age, ni écolo, ni mystique, ni futuriste… Ah oui, et un menu avec une écriture manuscrite (handwriting).

Tout cela parait contraignant, mais les Créatifs Culturels sont peu connus : dès lors il ne faut pas que le mouvement soit mal interprété.

Des bambous belges

Sur la durée des grandes vacances, Vincent et moi échangeons nos idées, pour produire 19 projets déclinés en 53 variantes ! Cela fait beaucoup, et pour cause : si je n’ai affaire qu’à lui, de son côté il soumet les projets à quelques CC. La démocratie continue donc : les avis fusent, divergent, et certains designs souffrent déjà du compromis…

Un concept émerge cependant, venant de Vincent : les bambous ! C’est une drôle d’idée de choisir une plante exotique pour un site pour la branche belge, mais voici :

Ce bambou chinois est une magnifique métaphore des Créatifs Culturels : le phénomène CC n’est pas émergent, presque personne ne le connaît encore, mais les racines sont en train de pousser, nombreuses, différentes, silencieuses…” (voir Pourquoi des bambous ? sur le site)

Après deux mois de brainstorming, les choses se précipitent, car la rentrée arrive : c’est que le nouveau site doit être prêt pour l’annonce d’une conférence le 26 septembre. Je convaincs Vincent d’abandonner certaines directives de départs et quant à lui, il tranche : ce sera la forêt de bambous et pas le blé qui pousse vers un ciel bleu.

En moins d’une semaine, le site est refait, la page Facebook est créée, ainsi que le modèle de newsletter…

Des sites comme dans les caravanes

Le bambou de cette nouvelle culture, lorsque son temps sera venu, deviendra visible pour tous. Mais pour qu’il développe son plein potentiel d’évolution de notre société, il faudra que ses différentes racines se reconnaissent enfin entre elles, qu’elles se sachent nombreuses et se comprennent complémentaires.

Eh bien j’espère avoir contribué à cette reconnaissance. Et qui sait si je n’en suis pas un aussi ?…

Les projets ont défilé
Les projets ont défilé

Et vous, êtes-vous un Créatif Culturel ? Répondez à ce questionnaire puis donnez le résultat dans le sondage ci-dessous…

Etes-vous un Créatif Culturel ? (pour vous aider, faites le test dont le lien est donné plus haut)

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Sacrée croissance

La “croissance” : voilà bien un mot dans la bouche de tous les politiques et de tous les décideurs. C’est la solution pour sortir de la crise, il n’y a pas d’alternative !

Le monde selon Marie-Monique Robin

Ce discours, je le met dans le même panier que celui prétendant qu’il n’y a que le nucléaire pour donner de l’énergie à tout le monde, celui défendant le libéralisme pour auto-réguler la société humaine, celui disant qu’il n’y a que l’agriculture industrielle pour nourrir le monde…

Je n’ai pas la prétention de dire que tout ça est faux : mais je suis à l’écoute d’autres discours, d’autres alternatives, et heureusement qu’il existe des journalistes indépendants pour nous délivrer une information différente.

Parmi eux, il y a Marie-Monique Robin, dont j’avais apprécié son documentaire “Les moissons du futur”, mais que vous connaissez peut-être par un film plus connu : “Le monde selon Monsanto” .

Nous sommes les 1435

J’ai utilisé plus haut l’adjectif “indépendant”, et c’est particulièrement vrai pour notre journaliste : elle a créé sa maison de production pour financer ses films. “Je veux être désormais propriétaire des images et interviews que je réalise, et développer une relation différente avec le public” lit-on sur son site.

Une partie de sa production se finance en crowdfunding, donc par des citoyens comme vous et moi. Voilà une belle occasion donnée à ceux qui veulent faire bouger les choses, et en particulier à ceux qui, comme moi, en ont marre du dogme de la croissance. Car le film en cours de production est “Sacrée croissance” , et l’appel aux co-producteurs est en cours : à l’heure où j’écris ces lignes, ils sont 1435, parmi lesquels votre serviteur…

(c) Banksy
© Banksy

Pour 30 euros

La participation se fait sous la forme d’une précommande du DVD, à recevoir en même temps que la diffusion en télévision. Il vous en coûtera 30 euros. Et c’est une somme que je donne volontiers pour défendre une information indépendante, source à laquelle je m’abreuve tous les jours. C’est aussi un acte citoyen pour refuser la télé-poubelle que l’on nous sert !

Alors, si vous êtes contre le “système”, votre apport à un tel film portera plus que de râler sur Facebook ou refaire le monde autour d’un verre…

A bon entendeur…

30 euros pour financer un film qui veut faire bouger les choses

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Philippe Patouraux, ou l’envie de faire bouger les lignes

Vouloir changer le cours des choses, c’est plus qu’un souhait pour Philippe Patouraux : c’est son métier. Cela faisait longtemps que je voulais l’interviewer, mais pour aborder un professionnel du “développement soutenable”, j’avais besoin d’un bon bagage : après plus d’un an de lectures et de blog, je me sentais prêt.

Voici le compte rendu de 1h32 d’interview informelle…

A la recherche des valeurs citoyennes

Philippe habite la Cité Radieuse (Le Corbusier) : tout un symbole !
Philippe habite la Cité Radieuse (Le Corbusier) : tout un symbole !

Sociologue de formation, mais “touche à tout” qui l’a fait exercer quelques métiers sans rapport avec nos préoccupations, Philippe est arrivé au constat que les valeurs des individus ont du mal à s’exprimer dans les organisations : “Je me suis rendu compte à quel point les organisations sont capables de réduire à néant les potentiels des individus. Et comme la distance est parfois abyssale entre l’évolution des valeurs dans le société civile et celle dans les entreprises.

Quand, arrivé en France, il a un patron “pas terrible”, c’est l’emploi de trop qui le fait décider de changer de cap : il se met à son compte, se consacrant aux thématiques de la “durabilité”.

Il est installé depuis une dizaine d’années à Marseille, mais c’est récemment qu’il fonde, avec trois autres associés, une société coopérative : Territoire & Environnement. Le but est de former et accompagner des collectivités (villes, communes…) pour, par exemple, mettre en place un Agenda 21 local ou un Plan Climat. Tout comme d’assister les entreprises dans des démarches R.S.E. (Responsabilité sociétale des entreprises) : les diagnostics énergétiques y ont une bonne part, mais Philippe est spécialisé dans un autre domaine, celui de l’humain.

Humains après tout

Et c’est même son cheval de bataille, considérant son rôle comme facilitateur et non comme un consultant prodiguant ses connaissances. Car il s’agit de mettre en place une  “bonne gouvernance”, et cela passe par faire exprimer la créativité des membres de l’organisation.

La connaissance, elle est là. Simplement, aujourd’hui, toutes les organisations n’ont pas la capacité de permettre à cette connaissance de s’exprimer dans l’entreprise. Donc le facilitateur va aider les salariés, les employés, etc, à exprimer toute leur créativité et les idées novatrices.

Et pourquoi tout ça, Philippe ? Eh bien, pour “saisir la bonne idée qui nous permettra justement d’aborder les choses autrement, plus respectueuses de l’environnement et de l’humain” . Car il faut faire adopter le développement durable non pas pour la rentabilité mais pour donner libre court au potentiel créatif des employés.

Vous l’aurez compris : Philippe ne cherche pas la confrontation ou la culpabilisation : professionnel de la nature humaine, il sait que le changement de comportement se fera par l’incitation, l’envie, et non par la contrainte.

Facilitateur Probe

Mais comment tout cela fonctionne-t-il, concrètement ?

En fait, Philippe et son équipe sont facilitateurs PROBE : “On est capable d’évaluer la durabilité d’une organisation, à partir d’une auto-évaluation, et ce en une journée” .

PROBE est un outil d’évaluation qui couvre tous les sujets de la durabilité, tout en clarifiant ce terme, pour arriver à des mesures concrètes : les points forts et les points faibles, mais aussi de se comparer à d’autres entreprises, dans le même secteur d’activité par exemple.

Cette évaluation est faite par un “consensus d’équipe”, càd que ce sont les employés qui répondent aux questions, d’où l’importance des “facilitateurs” comme Philippe. Le patron ne se trouve pas à la même table : “On veut qu’il y ait une liberté de parole, où les choses soient dites ! Et parfois on a des surprises, entre la vision du patron et celle de ses employés ! ” .

Nous avons vu en début d’article que Philippe était mécontent de la place de l’individu dans les organisations : avec son activité de facilitateur, il a trouvé exactement le bon rôle pour faire changer cet état de fait !

Financer l’invisible

A côté de cette activité, Philippe a co-créé Next World, une association pour “Penser au futur, agir au présent”. Au départ plateforme d’information pour une transition vers la durabilité, elle est devenue depuis peu un fond de dotation : “Dans les années qui viennent, notre but est d’avoir des petites sources de financement pour des petites expériences innovantes, au niveau d’un territoire, très localement : on veut financer l’invisible, ces toutes petites organisations qui ont des idées innovantes, et qui généralement n’entrent pas dans les cases de l’aide publique.

Ce financement vient d’entreprises et de leaders ayant envie de faire bouger les choses, en expérimentant de manière très concrète : c’est du mécénat, tout simplement. Mais était-ce utile de créer une énième fondation, n’aurait-il pas pu rejoindre une des nombreuses associations existantes ?

C’est la diversité : c’est bien d’en avoir, que le pouvoir ne soit pas toujours dans les mains des mêmes. Et puis nous ne voulons pas financer des projets à l’autre bout de la planète : on va financer des projets locaux – nous sommes dans une région où il y a vraiment besoin de ça.

En phase

Tout cela est bien beau, mais est-ce que ça “nourrit son homme” ?

J’en vis raisonnablement” (Philippe a une épouse, qui travaille, et deux enfants), il y a des hauts et des bas, mais, par la force des choses, il a compris qu’il n’était pas câblé pour une “carrière monolithique dans une entreprise” (ndlr : aïe,  je vais fêter mes 25 ans de carrière dans la même société en 2014 !) : “Tu prends toute la dimension de ton que tu peux avoir, une certaine liberté de dire les choses et de les faire, tu es en phase avec ce que tu es.”

Quand un informaticien prépare un interview...
Quand un informaticien prépare un interview…

Entre pessimisme et optimisme

Philippe veut changer le monde, et il en fait même son métier. Je ne pouvais dès lors éviter la question : quel espoir as-tu pour l’avenir ?

Je ne sais pas. Je suis des fois optimiste, des fois pessimiste” (ndlr : c’est par Philippe que j’ai eu connaissance du livre “Le Cygne Noir” de Nicholas  Taleb, pour qui répondre “Je ne sais pas” est bien plus sage que de se prononcer, comme le font tant d’experts). “Je pense que l’homme est capable de changer les choses, d’avoir des sursauts. Mais en fait ce que je crains le plus, c’est l’obscurantisme !” . Car, que ce soit dans son entourage ou dans les réseaux sociaux, Philippe est frappé par des idées qui ressurgissent, qu’il pensait appartenir au passé, et qui pourraient mettre à mal notre démocratie : “La démocratie n’est pas acquise : c’est une chose qui s’entretient” .

Voilà pourquoi Philippe croit beaucoup en la pédagogie et l’éducation : c’est par la connaissance que les gens changent de comportement, et il constate déjà une prise de conscience chez ses enfants.

Quant aux adultes, il faudrait qu’ils sortent du jugement permanent, qu’ils changent de posture face aux événements, et qu’ils développent leur sens critique…

… et c’est bien le but de mon blog.

Merci Philippe !

Changer le comportement des gens par l'incitation, plutôt que par la culpabilisation et la contrainte...

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