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Mark Miller sur une moto CZYSZ

La course des motos vertes

Sundance Channel est une chaîne TV plutôt mystérieuse quant à sa programmation. Elle est offerte par mon télédistributeur : quand je zappe dessus, je tombe le plus souvent sur un film avec des jeunes se posant des questions existentielles… Jusqu’à l’autre jour où débarque un documentaire avec des motos high-tech : celles de Tron ? ; celle de Batman ? Non, mais bien les motos de notre futur…

En 2009, le Tourist Trophy de l’île de Man, une course moto consistant à faire le tour de l’île de Man, créait une nouvelle compétition : le The Zero Carbon, Clean Emission Grand Prix. Elle concernait les motos électriques. Afin de ne pas les mettre en compétition avec les motos de course classiques, l’organisateur les faisait concourir quelques jours avant, avec un règlement adapté… disons plus “large”.

Bande annonce de “Charge”

Le film sur lequel j’étais tombé, probablement “Charge” ,  suit les équipes de par le monde, préparant leur bolide en vue de cet événement qui fera date dans l’histoire de la course moto. En Inde, en Allemagne, aux Etats-Unis, nous assistons à la mise au point d’engins où tout est à repenser, car les règles mécaniques traditionnelles n’ont plus cours. On met aux point des batteries surpuissantes (gare aux décharges !), on hésite entre un, deux ou trois moteurs (souvent des moteurs Agni, inventés par Cedric Lynch, grand savant un peu fou que l’on voit dans le film), et on se demande même s’il ne faudrait pas mettre un changement de vitesse pour ne pas déstabiliser le pilote. Bref, on réinvente tout, et les moments de désespoir ne manquent pas.

A l’approche de l’événement, la caméra fait le tour du public et des professionnels pour avoir leur avis sur l’arrivée des motos électriques dans cette course prestigieuse. Ça ricane, ça se moque : nous sommes dans un milieu qui ne jure que par le rugissement des moteurs et l’odeur d’essence, et une technologie propre et silencieuse n’y a pas sa place. On s’attend à voir passer des motos bricolées avançant aussi vite que des mobylettes : n’a-t-on pas monté à 50 minutes le temps de qualification alors que les pros font le tour en moins de 18 minutes ? Ah ça non, elles n’arriveront jamais à concurrencer le moteur à explosion – et puis à quoi ça sert ? Il faut quand même brûler de l’énergie pour avoir de l’électricité…

Mais quand ces motos débarquent sur le bitume, on s’étrangle avec son hamburger et les lunettes de soleil tombent du nez : on n’est pas dans le bricolage, le futur est bien là – et c’est d’autant plus impressionnant qu’il arrive avec des équipes et des constructeurs inconnus.

Mark Miller sur une moto CZYSZ
Une Honda ? Une Suzuki ? Non, une CZYSZ !

Et puisqu’on n’est pas dans l’amateurisme, des pilotes habitués au circuit sont sollicités pour monter ces nouveaux bolides. Après quelques explications (n’accélérez pas trop vite, ne maintenez pas le maximum pendant longtemps, ayez la jauge d’énergie à l’œil…), les voilà partant dans un sifflement de turbine… pour revenir enchanté ! Certes, on n’atteint pas encore les grandes vitesses (140 km/h de moyenne, quand-même !), mais les pilotes ont la sensation de glisser sur la route… et n’ont jamais vu autant d’animaux sur le parcours : ces derniers n’entendent pas arriver les motos, tout simplement ! Il y en a même un (de pilote, pas d’animal – quoique !) pour dire que c’est le plus beau jour de sa vie !

Bien-sûr, il y aussi des frustrations et beaucoup ne terminent pas le tour : batterie à plat ou moteur brûlé, on voit alors les pilotes pousser leur moto jusqu’à la prochaine descente, espérant relancer leur monture avec laquelle ils ont déjà un lien d’affection.

Ah les amis, j’ai suivi ce film avec passion et émotion. Après cela je vois nos motos (et voitures) comme les futures générations les verront : des machines fumantes, bruyantes et inefficaces. Car une autre information est apparue durant ce film, moment clé de cet article : le rendement d’un moteur à explosion (pour une moto de course) est de maximum 35 %. Avec le moteur électrique… on est à 90 % ! Et en plus, on récupère l’énergie du freinage.

Tout cela se passait en 2009. Aujourd’hui il y a un championnat pour les motos zéro carbone, le TTXGP, et d’aucuns disent qu’en 2014, elles iront aussi vite que les classiques.

Le futur est à notre porte : ce ne sont pas encore les voitures volantes, mais si je pouvais assister à l’abandon du pétrole comme énergie de transport, je serai déjà très content…

(Les photos utilisées dans cet article proviennent de cette galerie de Motorcycle-usa.com)

Le moteur électrique pour nos transports...

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Paul lit "Homo Disparitus"

Homo Disparitus

Paul lit "Homo Disparitus" dans le train
Paul lit “Homo Disparitus” dans un train… vide

“Admettons que le pire soit arrivé et voyons ce qui reste” : le “pire”, c’est la disparition de l’homme, du jour au lendemain, genre tout le monde a été enlevé par des extra-terrestres (oui, encore eux !). Voilà le postulat de départ du livre d’Alan Weisman : un événement hautement improbable (dans le sens : disparition instantanée de l’homme uniquement), mais instructif sur ce que nous laissons en héritage à la terre…

Pour l’écrire, Weisman a rencontré des scientifiques de tous bords, des gens de terrain, et visité des lieux témoins de notre passé, ou inquiétants pour l’avenir : son analyse dépasse l’imagination et ne se résume pas à l’image d’une ville en décrépitude, symbolisée par Tchernobyl.

Car le plus inquiétant, ce sont toutes ces machineries mises en place pour maintenir notre monde artificiel sous contrôle.

Que les installations de pompage de New York tombent en panne, et c’est 50 millions de litres d’eau qui se déversent par jour dans le métro : en 20 ans, les rues s’affaissent et les rivières se forment entre les buildings. Voilà un exemple de scénario décrit par l’auteur, imaginé avec les acteurs de terrain. Mais cela n’est rien : la nature s’en accommodera.

Par contre, les espèces vivantes n’apprécieront pas les raffineries de pétrole ! Une machine qui se grippe, un ordinateur qui tombe en panne, et elles ont toutes les chances de flamber… jusqu’à épuisement des réserves.

En plus de notre pétrole flamboyant, s’ajouteront nos centrales nucléaires qui fondront ou exploseront, emportant haut la main la course à la toxicité, devant nos plastiques se désagrégeant en particules de plus en plus petites – histoire que toute la chaîne alimentaire en profite !

A part cela, la nature reprendrait ses droits et “digérerait” la plupart de nos traces. Un nouvel ordre animal et végétal se mettrait en place, et les dernières victimes seraient nos animaux domestiques, inadaptés et subissant de plein fouet la sélection naturelle.

Et dans quelques millénaires, les seules créations qui resteraient de l’homme seraient ses sculptures de bronze… et ses briques de verres radioactifs.

L'aube de l'humanité (© 2001, l'Odyssée de l'Espace)
Dans un futur très lointain nos briques vitrifiées remonteront à la surface et donneront l’intelligence aux primates d’un coup de baguette… radioactive !

Entre fiction et travail journalistique, le livre de Weisman se lit avec plaisir. C’est un voyage dans le futur mais aussi dans le passé, avec l’histoire de l’homme et de la faune mondiale. C’est aussi une masse de rencontres, la visite de lieux abandonnés comme Varosha à Chypre, d’endroits insolites comme la zone démilitarisée coréenne, d’installations gigantesques comme la raffinerie de Texas City.

C’est, hélas, aussi un constat peu reluisant de notre impact planétaire… Dans nos hauts faits d’arme, on notera le massacre des pigeons migrateurs, probablement l’oiseau le plus répandu sur terre. Le dernier représentant mourut dans un zoo en 1914…

… La symbolique est forte, et je vous laisse y réfléchir.

“Homo Disparitus” de Alain Weisman, éditions J’ai Lu, 398 pages.

L'auteur insiste sur la faune décimée depuis que l'homme a su fabriquer des armes

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Paul et Mobilou survolent Petropolis

Bienvenue à Petropolis, le bac à sable du futur

ARTE est ma chaîne préférée, mais je dois avouer que leurs films ne sont pas toujours faciles. Et je me demande qui a consacré 43 minutes à regarder (tard) “Petropolis” ? Tourné par Greenpeace Canada, il s’agit de “perspectives aériennes sur les sables bitumineux” de la mine à ciel ouvert d’Alberta. On n’est pas très loin d’un “La Terre vue du Ciel”, mais on n’a pas le sourire enthousiaste de Yann, ni de luxuriants paysages aux couleurs éclatantes : plutôt des images surnaturelles aux formes abstraites qui pourraient être belles si elles ne signifiaient pas la destruction de la forêt boréale qui s’y trouve…

Le film se déroule sans commentaires (juste quelques textes au début). Sur une musique ambiant minimaliste (qui pourrait aussi fonctionner sur des paysages lunaires), nous survolons une plaie ouverte sur la terre : un chantier colossal mis en œuvre pour extraire du bitume brut.

Il s’agit en fait de la deuxième plus grande réserve de pétrole au monde : si toutes les ressources y étaient exploitées, elle atteindrait la taille de l’Angleterre !

Paul et Mobilou regardent Petropolis
Nous regardons Petropolis : Mobilou en a les cheveux qui se dressent sur la tête !

Biensûr, étant donné le commanditaire, le film est à charge, mais les images parlent d’elles-mêmes. Vu du ciel, l’enfer s’étend jusqu’à l’horizon. Et pourtant, nous apprenons à la fin du voyage que nous n’avons survolé que 3 % du chantier !

Après ça, nous irons visiter le site officiel de la région d’Alberta, haut lieu du tourisme (pour combien de temps encore ?) : www.oilsands.alberta.ca. On peut y lire tout le bénéfice de cette exploitation : création d’emplois, contribution à l’indépendance énergétique pour le continent, argent injecté dans la préservation de l’environnement et projets de société…

Entre ce site web et le film de Greenpeace, c’est le grand écart. Les points de vue sont opposés, et suivant ses convictions on choisira son camp. Mais beaucoup de voix s’élèvent pour dire que l’exploitation du sable bitumineux est le plus destructeur des procédés d’extraction d’énergie fossile. Même si vous n’êtes pas écologiste, regardez les images, et cette fois dites-vous que l’on paie le prix fort pour faire rouler nos belles voitures !

Quand je vois cette balafre sur la terre, je pense aux Primiens dans l’épopée “L’Étoile de Pandore” de Peter Hamilton : ils arrivent sur une planète pour en extraire toutes les ressources qu’ils ont besoin, sans considération pour les formes de vie s’y trouvant, puis envahissent la planète suivante, laissant derrière eux une boule de boue toxique.

Eh bien il ne faudra pas attendre les Primiens : nous avons déjà commencé le travail…

(Pour ceux qui veulent en savoir plus sur les sables bitumineux d’Alberta, je vous propose cet article dans le blog KKKanada.)

L'exploitation des sables bitumineux : un mal nécessaire ?

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